Excursion
Culinaire Alexandrine |
par Simone Béhar Nemon |
Alexandrie,
chez mes parents, nous mangions rarement dehors car nous avions une
cuisiniére à qui maman avait enseigné, un tas de bonnes choses, et nous
mangions mieux que dans les restaurants. Pour le chich Kebab on allait
chez "El Hati", et pour du poisson au San Giovanni ou bien au
Mex. Le "Foul" et les "Fallafels", sans pareils se
trouvaient à la Rue Nebi Daniel, chez Benyamin qui servait aussi un
appétissant fromage fris, et des oeufs hamines. A Aboukir on mangeait
des oursins "Ritzas" ; et je m'étais parfois demandée si
Champollion, de passage vers Rosette s'en était régalé lui aussi, |
Qui
se souvient du vendeur albinos qui, aux entre-actes du Cinéma Royal se
promenait à travers les rangées appelant "Eskimos-Chocolats-Mentips
! Good for stomach !" Et puis qui se
souvient des "Lokoumades", des
"Dondourmas", et des "Granitas ? " A la plage de Stanley Bey, vous souvenez vous des
vendeurs ambulants qui vendaient des "Colourias" et puis les vendeurs de pistaches qui vous
leurraient avec leurs jeux de "goz walla
fard ? " Sur la Corniche, on trouvait
parfois des vendeurs de maïs grillés "Douras" ou de châtaignes ; Aussi le vendeur de figues, criant
"Agamia Tin !
" , celui de dattes " Balah Beta'
l Malek ! " (indiquant que les dattes
venaient du jardin du roi). Et le vendeur de pastéques, poussant sa
lourde charrette criait " A la Sekina
! " (Indiquant qu'il ouvrirait la
pastéque au couteau pour vous faire voir qu'elle était bien rouge et
douce. Soi disant vous seriez libre de la refuser... |
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Assise
au café avec mon pére, je commandais un "Campbel" (une boisson pour les jeunes, faite avec un petit peu
d'angustura dans un verre de gazeuse "Spatis", servi avec une tranche de citron). Papa, lui, commandait
une biére "Stella", et l'on nous servait gracieusement
d'abondant "mezehs" (c'est à dire : des cacahuétes, des pommes frites, des
salades assorties, des "tourchis", et de la "tahina", en somme, un vrai festin !) |
Quand,
à la gare de Ramleh, je m'arrÍtais souvent au "Bresilien" pour un verre de café glacé, et au "Délice"
pour des pâtisseries, sans aucunes pensées pour ma taille. Je
choisissais parmi les babas au rhum, les éclairs, les palmiers qu'on
appelait "lunettes", les mille feuilles, les Meringues qu'on
appelait "baisers", les Sablés et tant d'autres, et puis en sortant, je
disais simplement à Vassilli, le directeur, "mettez les sur le
compte !" |
Aprés
plusieurs années, je suis retournée à Alexandrie, à la recherche du
temps passé. Comme dans le vieux film "Carnet de
Bal", rien n'est comme on s'en
souvient ! Tout change ; Alexandrie aussi ! Les gâteaux de chez Delice
n'étaient plus appétissants ; le café du Brésilien, comme de l'eau, et
les "mezehs"
réduits à quelques cacahuétes, comme mes souvenirs d'ailleurs ...
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